INTERVIEW Jean-Philippe JAWORSKI pour les IMAGINALES 2016 (par Orfilinn)
Vos deux premiers livres ont remporté plusieurs prix (Gagner la Guerre : Prix Imaginales du meilleur roman francophone 2009 et prix du premier roman Région Rhône-Alpes. Même pas mort : Prix Imaginales du meilleur roman francophone 2014 et prix Planète SF des blogueurs 2014). Vous avez été le coup de cœur 2009 du festival. Un beau palmarès et une belle reconnaissance pour un jeune auteur, comment avez-vous vécu cela ?
« Avant tout, ces marques de reconnaissance font immensément plaisir. Elles contribuent aussi à rassurer. Je n’ai pas l’écriture facile : ce que je couche sur le papier est le fruit d’un processus assez laborieux, émaillé d’hésitations et de repentirs. J’essaie autant que possible de remédier à mes insuffisances par des relectures et réécritures successives, mais j’ai souvent le sentiment de manquer de recul sur le texte final tout simplement parce que d’un jour à l’autre, je ne suis plus d’accord avec moi-même. Dès lors, voir mes romans distingués par différents prix contribue à dissiper certaines de mes incertitudes. Bien sûr, ce n’est rassurant que rétrospectivement ; pour les livres à venir, cela maintient la pression… »
Pourquoi avoir situé l’action de votre cycle Rois du Monde chez les celtes ? L’époque et les croyances se prêtaient judicieusement à un traitement « Fantasy » ?
« Une partie de l’imaginaire collectif, aux sources de la fantasy, provient du folklore. Et le folklore occidental est formé de résurgences plus ou moins métamorphosées de motifs celtiques. Or au cours des trente dernières années, l’archéologie et la linguistique ont fait des progrès considérables dans la connaissance du monde celtique de l’Antiquité ; dans une moindre mesure, le comparatisme religieux et les historiens ont aussi complété et révisé notre représentation de cette civilisation. Cela m’intéressait, sur le plan romanesque, de revenir aux sources de notre imaginaire en exploitant les découvertes et les hypothèses les plus récentes. Par ailleurs, l’outre-monde est si proche du nôtre dans la mentalité celtique que leur rencontre produit spontanément un univers enchanté, et par conséquent un univers de fantasy. »
D’ailleurs, concernant la 2ème partie de ce cycle, Chasse royale, il a été scindé en deux tomes, la première partie étant sortie en 2015. Où en est la deuxième partie ?
« Elle est bien avancée, puisqu’elle est déjà d’un volume équivalent à la première partie. Mais elle n’est pas finie : en effet, le premier tome ne comportait qu’une des trois parties de Chasse royale ; le deuxième tome en comportera deux. »
Votre premier recueil de nouvelles, Janua Vera, et vos deux premiers romans sortent en livre audio (chez Audible). Avez-vous participé à leur conception ? Était-ce un souhait de votre part ?
« Jean-Christophe Lebert, le comédien qui fait la lecture de mes livres, a eu l’amabilité de me contacter à titre privé. Nous avons donc pu échanger à propos des textes : nous nous sommes concertés sur quelques difficultés et je lui ai donné des informations sur certains passages ou certains personnages dont le développement ultérieur pouvait orienter l’interprétation. Je lui suis d’ailleurs très reconnaissant d’avoir opté pour une interprétation de conteur plutôt que pour une lecture plus lisse. Je vois d’après les évaluations sur le site d’Audible.fr que le public apprécie beaucoup sa performance dans Même pas mort et Chasse royale. »
Jean-Philippe Jaworski lisant des extraits de Même pas mort © Imaginales 2016
Durant les Imaginales 2015, vous avez lu certains passages de Même pas Mort dans la yourte, dans une ambiance sombre et confinée. Quel a été votre ressenti ?
« Comment dire ?… Bon, allez, soyons sincère ! Je vais vous livrer le souvenir le plus marquant qui m’en est resté. Pendant la lecture, un malotru musicien facétieux s’est mis à jouer de la bombarde juste à l’extérieur de la yourte. Une bombarde, c’est autrement bruyant qu’une flûte ! Et le croque-notes a interprété plusieurs morceaux ! Ce qui fait que j’ai dû vraiment hausser le ton pour rester audible. Mon côté prof bouillonnait et me poussait à sortir en vitupérant pour envoyer l’amphion au bureau du CPE. Comme je suis quelqu’un de civilisé, j’ai su garder mon calme mais j’ai failli y laisser ma voix. »
Vous revenez pour la 9e année consécutive aux Imaginales ! Que représente le festival pour vous ?
« C’est un événement incontournable dans l’année et un festival auquel je retourne toujours avec beaucoup de plaisir (malgré les joueurs de bombarde). C’est l’occasion d’y rencontrer des auteurs que l’on a lus mais que l’on n’a jamais rencontrés, d’y retrouver des amis et des acteurs du milieu. Par-dessus tout, la rencontre avec le public y est facile et très agréable : les échanges y sont très enrichissants pour les auteurs, puisqu’on a ainsi quantité de retours, mais aussi d’attentes, formulés par les lecteurs. »