THÈME 2025 : HORS NORMES

Thème

Interroger la limite, c’est faire un pas-sur-le coté. A l’instar de Pierre Bottero, nous allons durant ces quelques jours, nous efforcer d’interroger, de questionner, de scruter, d’observer, de palper, de réduire, de tâtonner, …. Ce qui nous fait. Quelle est cette essence en nous qui, tout en étant commun à toustes, nous rend unique ?

 

Et si, contre toutes attentes, nous étions toustes Hors Normes.?

 

Qu’est-ce qui a pu faire de moi un filtre particulier ?

 

Les aléas de mon existence que les mots ont ordonnés en un long récit, comme les rives d’un cours d’eau. C’est ce qu’on appelle une individualité, je crois.

 

Catherine Dufour “Les champs de la Lune“. 2024

 

Du handicap au super-héros.

 

Si nous allons interroger la norme, la limite, qu’elle soit sociale, idéologique, religieuse, physique ou autre, nous nous apercevrons sans doute que nous sommes tous et toutes finalement Hors Normes.

 

Ce qui reste de cette norme devient alors soit un cadre qu’on impose pour exclure ce qui dévie de l’ordre dominant, soit la somme des efforts que nous faisons pour aller l’un vers l’autre, pour vivre ensemble, en harmonie.

 

A l’heure des dystopies et des réalités sous contraintes, il est plus qu’urgent et souhaitable de se retrouver autour de textes, de discussions, d’échanges vivants et respectueux pour interroger ce qui fait l’Autre et ce qui résonne en soi, peut-être pouvons-nous en apprendre quelque chose de nouveau, de beau ?

 

« L’évasion n’est pas la liberté, et je suis las qu’on me ramène toujours aux murs concrets plutôt qu’aux portes que l’on crée. Je cherche l’affranchissement des règles, fussent-elles orthographiques. »

 

Plume D.Serves

 

Gilles FRANCESCANO

 

Directeur artistique des Imaginales

 

Les mondes imaginaires

Fantasy, roman historique, science-fiction, fantastique… Mais, c'est quoi tout ça ? En trois mots : tout ce qui ne relève pas du réalisme ou du roman psychologique. Aux Imaginales, on ne trouvera donc pas d'auteur qui ne raconte pas d'histoire ! Pas de récit autobiographique non plus… Comment s'y retrouver ? On essaie ?

La Fantasy

Un monde généralement archaïque ou de type médiéval, où la magie joue souvent un rôle et où l’on croise rois et capitaines, sorciers et mercenaires, fées et princesses.

De l’aventure et le bonheur de lire avant toute chose !

Quelques noms : Robin Hobb (cycle Le Soldat Chamane, cycle L’Assassin Royal), Glen Cook (cycle La Compagnie Noire), Stephen R. Donaldson (cycle L’Appel de Mordant), Pierre Pevel (cycle de Wielstadt), Henri Lœvenbruck (cycle Gallica), Pierre Pelot (Konnar le barbant), et bien sûr J.R.R. Tolkien (Le Seigneur des Anneaux), etc.

La bit-lit

De la fantasy urbaine, qui mord (to bite = mordre) et qui assume totalement son statut de littérature de distraction ! Avec une succursale : la romance paranormale. Des vampires, des loups-garous, des fantômes ou des démons.

Littérature à succès, la bit-lit envahit les télévisions du monde entier (Buffy contre les vampires, True Blood, Vampire Diaries…), les salles de cinéma (Twilight) et la plupart des librairies.

Quelques noms : Laura K. Hamilton (Plaisirs coupables), Patricia Briggs (L’Appel de la lune), Jaye Welles (Métisse), MaryJanice Davidson (Vampire et fauchée), Cassandra O’Donnel (Pacte de sang).

Le roman historique

Un arrière-plan réaliste, où passent des silhouettes du passé connues des lecteurs, avec des personnages principaux et des aventures inventées, au moins en partie. Le modèle en est Alexandre Dumas et Les Trois mousquetaires.

La fusion du réalisme et de l’imaginaire.

Quelques noms : Ken Follet (Les Piliers de la terre), Jean-François Parot (Les Enquêtes de Nicolas Le Floc’h), Ellis Peeters (Frère Cadfaël), Jeanne Cressanges (Le Luthier de Mirecourt), Roy Lewis (Pourquoi j’ai mangé mon père), Mika Waltari (Sinouë l’égyptien), etc.

La science-fiction

Des mondes alternatifs, généralement situés dans un futur plus ou moins lointain, sur Terre ou dans l’espace, mis en scène avec un minimum de crédibilité.

De la conquête spatiale à la critique sociale. Mais l’interrogation éthique n’est pas loin !

Quelques noms : Johan Heliot (La Lune seule le sait), Alain Damasio (La Horde du contrevent), Stephen Baxter (Les Vaisseaux du temps), Andreas Eschbach (Des Milliards de tapis de cheveux), Dan Simmons (Hypérion), Jack Vance (Le cycle de Tschaï), et bien sûr Frank Herbert (Dune), etc.

Le fantastique

L’irruption du surnaturel dans le monde réel. Gare aux fantômes, loups-garous, vampires et autres joyeusetés !

L’idéal pour se faire peur !

Quelques noms : Kai Meyer (La Fille de l’alchimiste), Elizabeth Kostova (L’Historienne et Drakula), Anne Rice (Les Chroniques des Vampires), Mélanie Fazi (Arlis des Forains), Francis Berthelot (Le Jeu du cormoran), Graham Joyce (Lignes de vie), et bien sûr Stephen King (Shining), etc.

Nombre d’invités du festival jouent dans plusieurs catégories comme Francis Berthelot (science-fiction, réalisme magique), Pierre Bordage (fantasy, science-fiction, roman historique), Jean-Louis Fetjaine (fantasy, roman historique), Alain Grousset (science-fiction, roman historique), Andrea H. Japp (polar, roman historique) ou Joëlle Wintrebert (science-fiction, roman historique). Sans oublier Pierre Pelot, l’auteur inclassable (roman noir, science-fiction, roman historique, littérature générale).

La Parabole du chat

Un genre littéraire ne se reconnaît pas à ses éléments externes. La présence d’un vampire, d’un dragon ou d’un extraterrestre dans un roman n’implique pas automatiquement, ipso facto, que l’œuvre relève du fantastique, de la fantasy ou de la science-fiction. Par contre, cela signifie que le texte s’inscrit dans le champ des littératures dites « non-mimétiques », appelées ainsi parce qu’elles ne cherchent pas à mimer la réalité – contrairement aux littératures « mimétiques », auxquelles appartiennent entre autres le mainstream (c’est-à-dire la littérature générale), le roman historique ou le polar.

Ce qui caractérise un genre littéraire, c’est son fonctionnement interne. Prenons un exemple. Imaginons que dans un roman, il y ait une scène où un chat demande à manger à son maître.

Si le chat se frotte et se refrotte contre la jambe de son maître, miaule à fendre l’âme, bref se comporte comme un chat ordinaire : vous êtes dans un roman relevant de la mimesis, c’est-à-dire de la littérature mimétique où la littérature mime le réel. Après, que ce soit un roman historique, psychologique, sentimental ou policier, peu importe, cela ne dépend pas du chat.

Maintenant, si le chat se met à parler pour réclamer son ron-ron, du style : « Alors, elle vient ma gamelle ? J’ai la dalle, moi ! », alors là, pour sûr, vous êtes dans la littérature non-mimétique, car un chat qui parle, cela n’existe pas dans notre univers connu. Reste à savoir dans quelle branche des littératures non-mimétiques nous sommes.

Si le maître manque de défaillir de stupéfaction, se demande s’il n’est pas en train de devenir fou, si ce chat n’est pas un suppôt de Satan, etc. et que, à la fin du roman, ni le maître, ni le lecteur n’ont de réponse : vous êtes dans le Fantastique.

Si la situation est admise, banale, mais que l’auteur ne justifie absolument pas cette situation extraordinaire, vous êtes dans la Fantasy.

Mais si l’auteur a rendu plausible cette situation, par des explications sérieuses ou pseudo-sérieuses (le chat est, en fait, un extraterrestre, un robot, ou bien il a subi des manipulations génétiques), alors vous êtes en pleine Science-fiction !

Denis Guiot
Directeur de collection